A110 1800 Gr. IV "Olympia Rallye 1972"
- Jürgen Clauss
- 1 août 2022
- 19 min de lecture
Dernière mise à jour : il y a 2 jours
COMPÉTITION CLIENT
HISTOIRE
RALLYE ZLATNI / RALLYE BULGARE
23.-25. JUNE 1972



© Todor Tomov [www.rally-club.bg]
SABLES D’OR
Devant la plage de la Côte d’Or sur la Mer Noire près de Sliven, les frères Takov poussent leur Berlinette en montée.
Yancho et Illia Takov, originaires de Bulgarie, étaient des pilotes de rallye actifs dans les années 1970, connus notamment pour leur engagement avec les Alpine A110 Berlinette. Yancho Takov, fils du ministre bulgare du commerce extérieur de l’époque, Peko Takov, acquit en 1972 une Alpine A110 1800 Gr. IV directement auprès de Jean Rédélé,
le fondateur d’Alpine.

© Todor Tomov [www.rally-club.bg]
PARC FERMÉ À SLIVEN – UN REGARD DANS LE FEU BLEU
Une chaude journée d’été à Sliven. La poussière flotte dans l’air, mêlée à l’odeur d’huile, d’essence et d’asphalte brûlant. Et les voilà – « Les Bleus », les légendaires Alpine Berlinette, alignées comme si elles avaient été crachées par le ciel
lui-même.
De gauche à droite : l’élégante 1600S de Tchoubrikov, fière et prête à combattre. À côté, forgée dans l’acier et la passion, la 1800 Gr. IV des frères Takov – une véritable bête venue de Bulgarie, avec son museau orange inimitable.
À droite, l’A110 1800 Gr. IV de Maurice Nussbaumer, prête à fondre sur la piste.
Et tout autour ? Un kaléidoscope de couleurs – le rouge et le jaune brillent sur les Bulgaralpines, comme pour rivaliser avec le soleil lui-même. Mais ce n’était pas qu’un simple jeu de couleurs : le département course de Dieppe savait parfaitement ce qu’il faisait. Les pare-chocs et les cornes de pare-chocs colorés étaient des signaux tactiques – des marques pour les initiés, des repères visibles pour les mécaniciens, les spectateurs et les pionniers du rallye. De loin,
ils annonçaient qui arrivait à toute vitesse, soulevant la poussière, le rugissement du moteur tel un cri de guerre.
Et au centre, la Berlinette Takov, ornée dès le départ de pare-chocs orange – une signature de vitesse, un avant-goût de détermination sauvage. Ce jour-là, Sliven ne voyait pas seulement un design français, mais un esprit de combat bulgare sur quatre roues. Ce n’était pas un simple Parc Fermé – c’était un monument au sport automobile.
© Todor Tomov [www.rally-club.bg]
Startaufstellung in Albena – Nr. 7 die Gebrüder Takov
RALLYE OLYMPIQUE 1972
13 - 19. AOÛT 1972
Le triomphe d’Alpine à travers l’Allemagne
ALLEMAGNE EN FIEVRE DU RALLYE
En août 1972, peu avant les Jeux Olympiques d’été à Munich, l’Allemagne accueille la plus grande manifestation de rallye jamais organisée:
la Rallye Olympique.
Avec cette épreuve, l’Allemagne vit en août 1972 son plus grand événement de ce genre – plus d’un demi-million de fans ont admiré les artistes du volant le long des routes.
Le parcours reliait les zones de voile de Kiel au stade olympique de Munich, unissant ainsi les deux sites des Jeux. L’itinéraire s’étendait sur 3 371 kilomètres et comprenait 62 épreuves spéciales totalisant 632 kilomètres. Sur les 307 équipes engagées, seulement 145 franchirent la ligne d’arrivée, soulignant la difficulté et la rigueur de cette course.
Le plateau était de très haut niveau international. La victoire revient au duo français Jean-Pierre Nicolas et Jean Todt,
au volant d’une Alpine Renault A110. En deuxième et troisième positions, on retrouve les Suédois Anders Kulläng /
Donald Karlsson ainsi que les Français Jean Ragnotti / Jean-Pierre Rouget, tous deux sur Opel Ascona 19 SR.
Plus de 300 concurrents venus de 15 nations se sont affrontés pendant une semaine sur plus de 65 spéciales entre Kiel et Munich, sur une distance totale de 3 300 km.

LES JEUX OLYMPIQUES
En amont des Jeux de Munich, l’élite mondiale du rallye s’est presque entièrement retrouvée du 13 au 19 août 1972 pour la « Rallye Olympique ». Cette première réunion complète de l’élite internationale du rallye en Allemagne devint un événement colossal nécessitant une organisation titanesque.
Les équipes d’usine Alpine, Ford, BMW, Opel et Datsun prirent le départ. Tous les grands noms du rallye étaient présents : Nicolas et Darniche (Alpine), Warmbold et Aaltonen (BMW), Mikkola et Glemser (Ford), Kulläng et Ragnotti, Greder et Madame Beaumont (tous Opel), ainsi que toute l’élite allemande.
Il y avait aussi un autre pilote, encore peu connu à l’époque : Walter Röhrl, avec son copilote Hannes Rothfuß. Quand ce jeune homme de 25 ans, originaire de Ratisbonne, envoya les premiers meilleurs temps dans sa Capri RS dès le début, tout le monde fut d’abord perplexe. Les questions fusèrent, même parmi les responsables:
« D’où vient-il ? Que fait-il ici ? Cela ne peut pas être vrai. »
Et il y avait aussi ce petit homme plutôt discret, qui accomplissait son travail de copilote dans le siège brûlant de la Alpine victorieuse de son ami français Jean-Pierre Nicolas. Il s’agit de Jean Todt, qui, sortant de la bleue Alpine 1800 gagnante, gonfla ses joues rebondies et sourit largement aux photographes. Oui, le même Jean Todt, futur directeur de Ferrari et ancien président de la FIA.
Source : www.speedweek.com


©McKlein

PRÉ-DÉPART ERBACH –
UN DÉPART PLEIN
Erbach, au cœur verdoyant de l’Odenwald. Le matin tôt repose en silence sur l’aire de pré-départ, mais sous cette quiétude, la tension monte parmi les pilotes. L’atmosphère est électrique. Au milieu des moteurs qui rugissent et des derniers contrôles, se tiennent deux hommes, unis par la passion, les origines — et une Alpine Berlinette 1800 Gr. IV: Yancho et Illia Takov.
Ils viennent de Bulgarie, le feu dans les yeux et le parfum de l’ingénierie française dans les narines. Les frères Takov, soutenus par le légendaire Illja Tchoubrikov, père de la Bulgaralpine, étaient plus que des pilotes. Ils étaient les ambassadeurs d’un rêve automobile qui franchissait les frontières politiques. Leur Berlinette n’était pas une voiture ordinaire. Destinée jadis à Ove Andersson, elle se tenait désormais sur la ligne de départ sous le drapeau bulgare. Livrée avec des pare-chocs orange éclatants — comme un signal au monde. Nous sommes là, et nous sommes prêts.
Puis vint l’épreuve spéciale n°36 à Schlüchtern — une fin brutale. Une panne, un abandon, la course s’arrête là. Le rallye est terminé. Mais pas leur esprit. Car ce que les Takov apportaient, c’était bien plus que la vitesse et la technique, c’était l’idée audacieuse que le sport automobile ne devait pas rester un privilège de l’Occident. Deux Berlinettes d’usine, envoyées directement par Jean Rédélé en Bulgarie — un véritable coup de tonnerre à travers le rideau de fer.
Le pré-départ à Erbach est devenu un symbole. Un symbole de renouveau, d’amitié au-delà des frontières.
RALLYE DE POLOGNE 1974
12.-13. JUILLET 1974

PAIX & AMITIÉ –
UN RALLYE SOUS LE SIGNE DE L’ESPOIR
Kraków, juillet 1974 — les routes tremblent, les moteurs rugissent, la poussière tourbillonne. La 34e édition du Rallye de Pologne promettait d’être un temps fort du calendrier, la seizième manche du Championnat d’Europe des rallyes et la troisième étape du Peace and Friendship Rally Cup — une série née de la vision que le sport automobile pouvait bâtir des ponts là où la politique érigeait des murs.
Paix & Amitié — quel nom ! Pourtant, sous cette bannière, se mêlaient courage, idéalisme et réalité amère. Vingt-sept épreuves spéciales séparaient le triomphe de la tragédie. Car bien que l’esprit de fraternité entre les peuples soufflait, l’organisation vacillait.
À Górka-Strachocina, lors de la spéciale 12, la catastrophe survint : la légende du rallye Sobiesław Zasada entra en collision frontale avec un véhicule d’un commissaire de course circulant en sens inverse, une défaillance fatale de la sécurité du parcours qui faillit coûter des vies.
Comme si le destin voulait aggraver le sort, le système de chronométrage dérailla lui aussi. Protestations, incohérences, et finalement un classement général qui laissait plus de questions que de réponses. Mais malgré toutes les difficultés, cette course laissa une trace. Car Paix & Amitié n’était pas qu’un simple nom, c’était une tentative de transformer la rivalité en respect. Et sur les routes polonaises poussiéreuses, l’idée qu’au cœur des spéciales, le rêve de compréhension pouvait survivre, brilla un instant.

© Robert Szombati Collection
© Robert Szombati Collection, András Fekete
PISTE DE GRAVIERS – UNE DANSE DANS LA POUSSIÈRE
Le ciel est bas sur la campagne polonaise, gris et lourd, pourtant sous les roues du CK-0171, la poussière danse. Radislav Petkov et Gantcho Gantchev ne sont pas des pilotes du dimanche, ce sont des chasseurs.
Et leur proie, c’est le temps.
Le gravier sous eux est rude, implacable, une résistance constante à la vitesse. Mais le duo ne connaît pas la pitié, ils lancent la voiture dans les virages, les pierres claquent contre les ailes, la suspension hurle. Le paysage ?
Un livre d’images de collines, champs et forêts anciennes. Mais pour Petkov et Gantchev, seul compte le prochain apex,
le prochain dérapage, le prochain instant où la machine vole plutôt que roule.
Le CK-0171, mû par la précision et la folie, laboure le cœur de l’Est comme si le chemin lui-même était la destination.
Ici, sur ce terrain meuble, les règles sont différentes — ici, triomphe celui qui allie sensation et courage,
qui ne craint pas le gravier mais l’aime.
Et tandis que le rugissement du moteur s’éloigne doucement, il ne reste qu’une trace dans la poussière —
et l’écho d’une passion qui résonne longtemps entre les arbres.
RALLYE ZLATNI / RALLYE BULGARE 1975
21.-22. JUIN 1975

PLEIN À CRAQUER - PLEIN DE PASSION
Nous sommes en 1975, quelque part entre Plovdiv et Pamporovo, et la Bulgarie est en effervescence. Le rallye est en ville, et la foule afflue en masse. Dire que c’est complet est un euphémisme ; c’est un lieu de pèlerinage pour les passionnés d’essence, une fête de la vitesse au cœur de la vie quotidienne socialiste.
Les bords de route débordent. Tribunes, parkings, toits — chaque espace devient une arène, chaque poutre une tribune. Hommes, femmes, enfants — tous se pressent le long du parcours, avides du grondement des moteurs, du sifflement des bolides, d’un regard furtif sur les légendes d’Alpine, Wartburg, Moskvitch ou Lada.
© Nicolay Krazalev
Dans le Bloc de l’Est, le rallye n’était pas qu’une course — c’était une forme d’évasion, une tempête de liberté,
une démonstration d’audace technique contre la grisaille quotidienne. Quand les machines hurlaient à plein régime dans les villages, le pays se transformait en un cœur palpitant d’adrénaline, de poussière et d’euphorie.
Le rallye de Bulgarie 1975 n’était pas une simple compétition. C’était une fête populaire, une extase collective, la preuve que le sport automobile ne connaît pas de frontières, seulement de la passion.
Et la passion était partout ici — forte, vivante, irrésistible.
CHAMPION DE RALLYES BULGARE
1975 — un nouveau chapitre commence, écrit en huile, fumée et volonté de victoire. Le bruit des moteurs résonne dans les montagnes bulgares, mais un se démarque : CK-0172 — anciennement CK-0171 — désormais entre les mains sûres d’un homme prêt à entrer dans l’histoire : Ivan Nikolov.
Le changement de plaque d’immatriculation n’était pas qu’une formalité — c’était un nouveau départ. La Berlinette, éprouvée au combat et conduite par des légendes, reçoit un nouveau pilote en la personne de Nikolov.
Un homme qui sait non seulement conduire une machine, mais la dominer. Précis, intrépide, affamé.
Que ce soit sur le gravier rude de Pologne ou dans les courses de côte audacieuses de Bulgarie — Nikolov pousse l’Alpine à ses limites. Les fans acclament, les concurrents tremblent. La CK-0172 danse sur l’asphalte et le gravier comme un prédateur à l’affût — puissante, élégante, implacable.
À la fin de l’année, ce n’était pas qu’un nom sur la liste des vainqueurs. C’était une déclaration :
Ivan Nikolov, champion bulgare de rallye 1975. Un homme, une voiture, un triomphe — né du feu du sport automobile. La CK-0172 n’était plus une simple voiture. Elle était une légende.

© Robert Szombati Collection
SOEURS DANS LE CRIME— DES LÉGENDES DERRIÈRE LE RIDEAU DE FER
Entre béton et barbelés, là où souffle le vent glacial de la Guerre froide, roulaient deux éclairs bleu flamboyant —
les seules véritables Alpine A110 d’usine à avoir jamais pénétré dans le Bloc de l’Est. Ces Berlinettes étaient plus que des voitures de course. Elles étaient le symbole d’une passion interdite, des chefs-d’œuvre technologiques qui franchissaient les frontières et libéraient les rêves.
Dans le parc fermé, elles se tenaient côte à côte : la n°9, ancienne Alpine d’usine 9846HL76, désormais pilotée par le héros hongrois Attila Ferjancz, et la n°12, la légendaire Berlinette des frères Takov. Deux combattantes, côte à côte — une rareté derrière le Rideau de Fer.
Des mains de l’usine Jean Rédelé directement à celles des pionniers bulgares du rallye — Yancho et Illia Takov —
ces machines avaient une mission bien au-delà du sport automobile.
Équipées de pare-chocs orange vif pour être reconnues de loin, elles étaient des voitures de combat dans la poussière des spéciales, des ambassadeurs brillants de l’ingénierie française à l’ombre des barrières politiques.
Ces deux Alpine A110 étaient plus que des véhicules. Elles étaient des ponts entre des mondes qui restaient autrement distants. Chaque course, chaque virage, chaque spéciale était la preuve que vitesse et courage ne peuvent être arrêtés par des frontières. L’Alpine A110 d’usine dans le Bloc de l’Est — deux légendes sur quatre roues, immortalisées dans la poussière, l’asphalte et la mémoire.

© Robert Szombati Collection
LE TEMPS DE LA SOUFFRANCE— UN ESPRIT COMBATIF
1976 — la Berlinette autrefois fière des frères Takov porte de profondes cicatrices. Chaque griffure, chaque trace raconte les luttes acharnées sur les pistes poussiéreuses et la dure vie derrière le Rideau de Fer. La fibre de verre bleuâtre montre des signes d’épuisement, mais l’âme de l’Alpine brûle encore intensément.
Son propriétaire de l’époque, Ivan Nikolov, n’abandonne pas. Malgré les dégâts évidents, le manque de pièces de rechange et un entretien insuffisant, il continue à engager l’Alpine dans des rallyes locaux — signe d’une volonté et d’une passion intactes. La voiture peut être marquée, mais elle continue de rouler, défiant les adversités, combattant les difficultés du temps et le poids du Bloc de l’Est.
Cette Berlinette n’est plus un simple véhicule. C’est un témoignage vivant d’endurance, un symbole pour ceux qui ne renoncent pas même lorsque les circonstances sont contre eux. L’Alpine Takov — une combattante dont le cœur bat toujours malgré toutes les blessures.
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Á LA RETRAITE— LA GUERRIÈRE OUBLIÉE
Autrefois flamboyante dans la fièvre des courses, elle est aujourd’hui abandonnée à l’ombre — dans une cour poussiéreuse, entre poubelles et détritus. L’Alpine Takov, autrefois fière Berlinette, semble brisée, épuisée par des années de lutte et de négligence. Sa carrière de course brillante semble terminée, les jours des virages rapides et des fans acclamant comptés.
Si elle était encore roulante dans cet état pitoyable reste un mystère. Pendant de nombreuses années, elle a vécu cachée en Bulgarie, oubliée du monde. Maltraitée, pillée, son ancien éclat fané — un vestige oscillant entre désespoir et déclin silencieux.
Pourtant, dans cette décrépitude réside une histoire de passion, de courage et d’esprit inébranlable du sport automobile. L’Alpine Takov est plus qu’une carrosserie et un moteur — c’est une légende qui attend d’être redécouverte et ravivée.
Un destin qui, malgré tout, espère la rédemption.
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SEARCH AND RESCUE
FRENCH CONNECTION
MARS 2004
L’ODYSSÉE D’UNE BERLINETTE – DE L’OUBLI À LA RENAISSANCE
Cyril Mancel, fils du légendaire rédacteur en chef de Berlinette Jean-Jacques Mancel, et Monika Mancel tenaient autrefois les restes tristes d’une Berlinette dans leurs mains – une Berlinette dont l’histoire semblait perdue dans le brouillard du temps. Ce véhicule, autrefois une brillante machine de course, était maintenant une ombre de lui-même, endommagé et pillé, un fantôme attendant la rédemption.
En octobre 1993, après des années d’exil en Bulgarie lointaine, la Berlinette retrouva enfin le chemin de son pays d’origine, la France – attesté par des documents douaniers. Pour l’expert, il était évident : c’était une version compétition originale, un joyau de l’histoire du sport automobile.
Mais personne n’osa restaurer ce morceau unique ni approfondir son histoire. Au contraire, elle fut davantage dépouillée, privée de ses pièces précieuses – une lente dégradation qui faisait mal au cœur de tout amateur de sport
automobile. Au terme de sa longue odyssée, elle se tenait là – nue, profanée, plus morte que vivante.
L’espoir qu’elle soit jamais ramenée à la vie était une lumière vacillante dans l’obscurité.
Puis, en mars 2004, survint un tournant. Un appel de Monika Mancel à moi – une chance de sauvetage, de renaissance. Je pris en charge l’épave de Cyril Mancel, commençant immédiatement une recherche méticuleuse pour déchiffrer l’histoire perdue et trouver les pièces manquantes.
Au début, on considérait que le véhicule était l’ancienne A110 1600S d’Illja Tchoubrikov, cet homme qui, en tant que producteur et licencié, construisait les célèbres Bulgaralpines et entretenait des liens étroits avec Jean Rédélé.
Mais la carrosserie étroite de la 1600S, prouvée par des photos historiques, élimina cette hypothèse.
La véritable histoire se révéla lors d’un appel décisif avec Illja Tchoubrikov lui-même. Il raconta que deux A110 « Client-Competition » avaient rejoint la Bulgarie en 1972. Avec son ami Yancho Takov, il avait visité l’usine Alpine à Dieppe.
Là, dans les salles sacrées du département compétition « Service Courses », se trouvait la légendaire Alpine 1800 Gr. IV – avec ses ailes larges, les fameuses « Ailes Plates » du Groupe 4 et des pare-chocs orange vif remarquables.
Ce véhicule, initialement préparé pour Ove Andersson, suscita immédiatement le désir de Yancho Takov.
Takov acheta cette Berlinette unique et l’amena en Bulgarie. Le registre des véhicules de Gilles Vallerian confirme:
cette voiture fut l’une des toutes premières à quitter l’usine avec les larges ailes caractéristiques.
La série de photos que je découvris montre l’image triste de l’épave au moment où elle arriva entre mes mains –
un morceau apparemment perdu de l’histoire du sport automobile, dont l’âme dormait encore profondément dans les carrosseries déchirées.
Mais ceci n’est pas une histoire de fin. C’est le récit d’une résurrection, de la passion d’un homme qui a entendu le murmure du passé et ramené la Berlinette, pièce par pièce, vers la lumière – sur la piste, dans le cœur de tous ceux qui aiment le vrai esprit du rallye.
BLOOD SWEAT AND TEARS
SPÉCIALISTE DE LA PRUDENCE
AOÛT 2012
PERTE TOTALE
ATTENTION SPÉCIALISTE – UNE LEÇON DE CONFIANCE ET DE TRAHISON
Août 2012 – Un moment amer, qui plane comme une ombre sur le long voyage de cette Berlinette.
En 2004, j’étais au début de mon parcours de restauration – plein d’espoir, mais sans l’expérience nécessaire avec la résine polyester et les fibres de verre. Convaincu de confier la carrosserie à un professionnel, je la remis à un soi-disant spécialiste près de Passau, un homme qui prétendait connaître la restauration des Alpine A110.
Mais l’espoir se transforma en une attente de plusieurs années – plus de 8 longues années où la carrosserie resta là, coupée en trois parties, immobile, sans progrès, sans vie. Au lieu d’amour et de soin, je reçus ce qui ressemblait à un cachot. Une épave morcelée et la douloureuse certitude que l’acompte versé – une somme à cinq chiffres – avait simplement disparu. Ni remboursé, ni justifié – retenu.
Ce comportement malhonnête fut l’un des moments les plus sombres de mon histoire de restauration,
une trahison de confiance et de passion. Je ne citerai pas de noms, mais cet avertissement s’adresse à tous ceux qui rêvent de posséder une voiture de course. Soyez vigilants ! Vérifiez scrupuleusement la crédibilité et la compétence de ceux à qui vous confiez vos trésors.
Car parfois, ce ne sont pas les machines lourdes qui luttent le plus, mais la confiance qu’il faut accorder. Attention au spécialiste ! Ne vous laissez pas tromper – car tous ceux qui disent « professionnel » ne le sont pas forcément sincèrement.
«FAITES-LE VOUS-MÊME» – LA RENAISSANCE D’UNE LÉGENDE
Huit longues années d’attente, de déceptions, puis la décision, se retrousser les manches, apprendre, progresser.
Je me suis plongé dans le monde de la résine polyester et des fibres de verre, avançant pas à pas, souvent maladroitement, mais avec passion et détermination.
Le hasard me mena à Willi Deppert, un vrai maître de son art. Un homme avec quarante ans d’expérience dans la fabrication de pièces de sport automobile en fibre de verre, qui louait aussi des kayaks – mais bien plus que cela. Un gardien d’un savoir-faire ancien, qui me donna non seulement son savoir, mais aussi une amitié. Ses conseils, astuces et sa patience inépuisable furent le moteur de mon parcours de restauration.
En un an, la Berlinette 1800 Gr. IV sortit de son sommeil de la Belle au bois dormant. Couche après couche, fibre après fibre, ce monument de course retrouva sa forme fière.
Mais le travail fut bien plus qu’un simple artisanat – ce fut une quête d’authenticité, de l’esprit véritable de ce véhicule unique.
Comme l’un des premiers modèles du Groupe 4 avec larges ailes, elle conservait encore la gueule de requin du modèle de série, l’admission d’air caractéristique sous le pare-chocs avant, qui apportait un souffle frais au radiateur.
Mais sous la surface se révélaient des merveilles techniques.
Un conduit de refroidissement raide guidait l’air vers le radiateur élargi du Renault 16, tandis que l’huile, auparavant à l’arrière, trônait maintenant à côté du radiateur. Un puissant ventilateur, également issu du R16, assurait le flux d’air quand la chaleur montait ou la vitesse baissait.
La batterie, contrairement aux versions ultérieures du Groupe 4, resta en bas – cachée dans un caisson en fibre de verre derrière le radiateur, témoignage de l’ingénierie qui équilibre habilement performance et refroidissement.
Cette renaissance fut non seulement un défi artisanal, mais une déclaration d’amour à l’Alpine Berlinette – une ode à la passion, à la persévérance et à l’art du «faire soi-même».
PEINTURE
OCTOBRE 2012
VAPORISEZ & PRIEZ
Après le devoir ardu de la peinture vient le plaisir, le délicat remontage de la légende. Chaque pièce a été soigneusement retravaillée, restaurée et triée depuis des mois – prête à être montée, pleine d’anticipation pour le moment de retrouver sa place.
La planification est ici plus qu’une organisation – c’est la base qui garantit le flux du travail et empêche que le projet soit ralenti par un manque de pièces.
Le temps dur où des heures inlassables produisaient peu de progrès visibles est révolu. Maintenant, chaque pièce, même la plus petite, trouve sa place d’origine et y reste, solidement ancrée, comme si elle y avait toujours été.
Pièce par pièce, la sculpture prend vie, les lignes de la Berlinette se reforment, puissantes et fières.
À chaque minute que je consacre au projet, elle se rapproche un peu plus de sa perfection – une œuvre vivante de passion et d’artisanat qui bientôt révélera toute sa beauté.
REMONTAGE
DÉCEMBRE 2012
PAS À PAS
Après le devoir ardu de la peinture vient le plaisir, le délicat remontage de la légende. Chaque pièce a été soigneusement retravaillée, restaurée et triée depuis des mois – prête à être montée, pleine d’anticipation pour le moment de retrouver sa place.
La planification est ici plus qu’une organisation – c’est la base qui garantit le flux du travail et empêche que le projet soit ralenti par un manque de pièces.
Le temps dur où des heures inlassables produisaient peu de progrès visibles est révolu. Maintenant, chaque pièce,
Pièce par pièce, la sculpture prend vie, les lignes de la Berlinette se reforment, puissantes et fières.
À chaque minute que je consacre au projet, elle se rapproche un peu plus de sa perfection – une œuvre vivante de passion et d’artisanat qui bientôt révélera toute sa beauté.
BACK ON TRACK
LE CHEMIN EST LE BUT
AVRIL 2014
NE JAMAIS ABANDONNER
Quel long et difficile chemin, un sentier plein d’erreurs, de hauts et de bas, semé d’obstacles et de revers personnels. Mais abandonner ? Jamais.
Dix ans après l’achat de cette épave apparemment perdue, et seulement deux ans après avoir pris moi-même en main la carrosserie, elle roule enfin de nouveau – puissante et fière – sur les routes de la Forêt Souabe. Pour la toute première séance photo.
Tous les efforts, toutes les nuits blanches, les frustrations et les défis – ils sont oubliés, effacés dans ce moment de joie.
La Berlinette, autrefois laissée pour morte, presque perdue, est de retour à la vie.
Cette image, ce retour à la vie, suscite une vague de bonheur, de satisfaction et de fierté profonde. Car ce n’est pas seulement le but qui compte, c’est le voyage lui-même qui nous façonne et nous pousse.
Et ce voyage en valait plus que la peine.
GET OUT AND DRIVE
LE MIEUX EST L´ENNEMI DU BIEN
AOÛT 2017
SE SÉPARER FAIT MAL
La n°72 du Rallye Olympia 1972 fit ses premiers tours de roue sur les collines douces et les routes sinueuses de la Forêt Souabe. Sa vue était de la pure magie – une tentation irrésistible qui conquit mon cœur en un éclair. Je me jurai que notre histoire durerait éternellement.
Mais comme souvent, les histoires d’amour se terminent de manière inattendue et douloureuse.
Un nouvel admirateur entra dans ma vie – un cow-boy qui traversa l’Atlantique rien que pour lui déclarer sa flamme.
Je résistai de toutes mes forces à ce désir naissant, mais après une longue nuit dans le showroom, remplie d’histoires, d’anecdotes et d’innombrables verres de vin rouge, ma décision était prise.
Notre séparation était scellée.
C’est le cœur lourd que je la laissai partir, sachant que je ne pouvais la retenir. Quelques semaines auparavant seulement, Jean Charles Rédélé m’avait fait une offre irrésistible –
l’un de ses prototypes A210 Le Mans mis en vente.
Ainsi, le proverbe « Le mieux est l’ennemi du bien » prit tout son sens. Ma chère Berlinette traversa l’Atlantique pour rejoindre San Francisco, où elle brille désormais dans les plus prestigieux événements de voitures classiques.
Parfois, quand le soleil scintille au-dessus de la Marina Bay, elle réapparaît, majestueuse et fière. Lors de ses sorties dominicales sur le pont du Golden Gate, elle attire tous les regards passionnés en route vers un Cars & Coffee à Sonoma – une étoile brillante dans le firmament des voitures de collection.
CAR IN DETAIL
CHASSE AU TRÉSOR
LIPSHEIM - REIMS – PARIS
TRÈS JOLIE
Difficile à croire que toutes ces pièces reposent désormais à leur place d’origine. Plus qu’une coque nue et un châssis, l’épave n’avait rien d’autre à offrir lorsqu’elle arriva entre mes mains.
Mais ma vision était claire, bien avant que son éclat fané ne renaisse. C’était une perle au milieu des cailloux –
son éclat perdu, à peine remarquée du monde, bien qu’elle méritât de briller.
Chaque détail devait retrouver l’aspect qu’il avait lorsque Yancho Takov la récupéra à Dieppe pour la faire courir au Rallye Olympia à Kiel.
Outre un travail de restauration acharné, ma quête de pièces d’origine me mena à travers toute la France: Paris, Reims, Lipsheim – lieux de pèlerinage dans ma chasse aux joyaux oubliés.
Mais au final, je ne me suis pas entièrement soumis à l’original.
Comme pour les dames les chaussures, ce sont les jantes qui font l’élégance des voitures.
Les jantes Gotti Monte Carlo trois parties en or mat contrastent audacieusement avec le bleu métallisé – seul un mince rebord argenté rappelle en écho brillant la tradition.
L’inscription « alpineLAB » gravée sur la lèvre extérieure scelle cette petite rébellion – un clin d’œil créatif du restaurateur, une signature montrant que la princesse de l’Olympia porte désormais, en plus de son histoire, une nouvelle empreinte.
CONCOURS
THE CAIL, RASSEMBLEMENT DE SPORT AUTOMOBILE
MONTERAY CA, AOÛT 2018
L’ADOUBEMENT
Difficile à croire que toutes ces pièces reposent désormais à leur place d’origine. Plus qu’une coque nue et un châssis, l’épave n’avait rien d’autre à offrir lorsqu’elle arriva entre mes mains.
Mais ma vision était claire, bien avant que son éclat fané ne renaisse. C’était une perle au milieu des cailloux –
son éclat perdu, à peine remarquée du monde, bien qu’elle méritât de briller.
Chaque détail devait retrouver l’aspect qu’il avait lorsque Yancho Takov la récupéra à Dieppe pour la faire courir au Rallye Olympia à Kiel.
Outre un travail de restauration acharné, ma quête de pièces d’origine me mena à travers toute la France:
Paris, Reims, Lipsheim – lieux de pèlerinage dans ma chasse aux joyaux oubliés.
Mais au final, je ne me suis pas entièrement soumis à l’original.
Comme pour les dames les chaussures, ce sont les jantes qui font l’élégance des voitures.
Les jantes Gotti Monte Carlo trois parties en or mat contrastent audacieusement avec le bleu métallisé –
seul un mince rebord argenté rappelle en écho brillant la tradition.
L’inscription « alpineLAB » gravée sur la lèvre extérieure scelle cette petite rébellion – un clin d’œil créatif du restaurateur, une signature montrant que la princesse de l’Olympia porte désormais, en plus de son histoire, une nouvelle empreinte.
Pendant dix jours, chaque mois d’août, des connaisseurs et passionnés du monde entier se réunissent sur la péninsule de Monterey – une célébration du design automobile, de l’ingénierie de haut niveau et d’une camaraderie passionnée.
Le joyau de tous ces événements est « The Quail – A Motorsport Gathering ».
Nichée dans l’écrin verdoyant d’un terrain de golf bordant la majestueuse chaîne de Santa Lucia, la haute gastronomie rencontre les plus précieux joyaux du sport automobile classique.
Ici, les plus grands constructeurs dévoilent leurs dernières merveilles – mais les véritables stars sont les légendes d’antan.
Les billets, strictement limités, s’arrachent comme de l’or – à plus de 700 dollars l’entrée, un tarif qui n’arrête que les moins passionnés.
Quant aux places au prestigieux concours, elles sont aussi rares qu’un diamant – seuls quelques élus ont l’honneur d’y participer. Être sélectionné est déjà un adoubement.
Et là, au milieu de cette élite triée sur le volet, elle se tient – la petite Alpine, un bijou délicat sur la pelouse luxuriante de The Quail. Elle se mesure aux géants, concourt dans la catégorie « Post War Racing Cars » pour la gloire et l’honneur.
En bref: la 1re place pour la plus petite des concurrentes arriva comme un coup de tonnerre.
Les juges, envoûtés par le charme inimitable de la petite Française, réalisèrent un rêve.
L’OLYMPIA RALLYE A110 triomphe face à de prestigieux rivaux – une victoire qui sonne comme un adoubement.
À noter – pour l’anecdote – que trois des membres du jury étaient d’origine française, ce qui pesa sans doute dans la balance. Mais qui s’en soucie ?
Le propriétaire comblé de la n°72 rayonnait autant que le soleil californien, célébrant ce triomphe historique –
un moment gravé à jamais dans l’histoire.